Une ordure d’Irvine Welsh réussissait le pari audacieux de la contamination du récit par un élément intérieur – un flic ripou jusqu’à la moelle, cousin écossais du Bad Lieutenant de Ferrara, tente de garder le dessus sur le ver solitaire rongeant jusqu’aux pages même du roman, par un effet de superposition de ses pensées malades à celles d’un ténia analysant les failles de son hôte avec une acuité vraiment dérangeante.Un tour de force dramaturgique, astucieux update des expérimentations d’Alcools d’Apollinaire, a priori inadaptable visuellement. Le film de John S. Baird botte en touche et laisse complètement de côté cet aspect du récit. Tout au plus, l’antihéros enchaînera les visions narcotiques convenues, personnalisées par un psy sorti tout droit d’un cauchemar opiacé de Terry Gilliam. Une belle énergie chaotique et l’abattage jouissif de James McAvoy n’y font malheureusement rien : dévêtu de ces atours essentiels, le récit ne fait qu’enchaîner les petites, toutes petites provocations ayant pour seul et faible mérite de nous rappeler à quel point la surenchère dans le trash de ces dernières années nous a anesthésié à la violence au lieu de nous y sensibiliser.
FILTH de John S. Baird
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